Trop tard pour vendre, trop tôt pour acheter

Cette fois, la situation est réellement inédite. Personne n’avait imaginé le scénario d’une économie mondiale mise en sommeil pendant plusieurs semaines. Afin d’enrayer la pandémie de COVID-19, les gouvernements du monde entier ont mis en place des mesures de distanciation sociale et de confinement des populations. Mais rassurez-vous : nous ne sommes pas là pour revenir sur ces stratégies ou sur l’efficacité de tel ou tel plan, car il existe déjà suffisamment d’experts pour le faire.

Face à cette incertitude, les marchés ont très fortement corrigé. Cette fièvre vendeuse n’a épargné aucune classe d’actifs : les cours, déjà bas, ont été tirés à la baisse par des investisseurs en proie à la panique, qui vendaient tout ce qu’ils pouvaient, à défaut de vendre ce qu’ils voulaient, dans une course effrénée à la liquidité. Les marchés ont également connu des mouvements d’une rapidité inédite et des niveaux de volatilité qui n’avaient plus été observés depuis 30 ans. Les banques centrales et les gouvernements ont réagi très vite et de manière massive afin de stabiliser les marchés financiers, de protéger l’économie réelle et d’aider les chômeurs, mais également – pour certains marchés du crédit – de relancer la liquidité qui s’était tarie en raison du manque d’intermédiaires financiers. Certes les temps sont durs, mais ce n’est pas la fin du monde. Prenez-soin de vous.

L’indice HFRX Global Hedge Fund EUR affiche une performance de -6,46 % durant le mois.

 

Stragégie Long short equity

En règle générale, cette stratégie a bien résisté durant le mois. Sur une base absolue, la performance moyenne se situe aux alentours de -4 à -9%. Cependant, sur une base relative, la stratégie a offert une protection très correcte face à la correction du marché. Jusqu’au milieu du mois de mars, les fonds actions L/S ont été très résilients, grâce à leurs portefeuilles de positions vendeuses qui ont largement compensé les pertes enregistrées par les positions longues. Les gérants ont maintenu leurs expositions nettes à des niveaux stables et ont laissé les expositions brutes décroître sous l’effet du marché, pour adapter les portefeuilles face à l’environnement plus volatil. Durant la semaine du 16 mars, les positions longues les plus courues ont fortement chuté. En parallèle, les portefeuilles de positions short n’ont pas été particulièrement rentables. Ces dernières n’ont pas suivi le marché, notamment en raison des interdictions de ventes à découvert et des couvertures prises sur les positions short, dans une optique de prise de bénéfices. Les stratégies LS investissant dans la technologie ou le digital ont globalement surperformé. En effet, ces fonds se sont positionnés « longs » sur les entreprises bénéficiant des mesures de distanciation sociale et ont généré des résultats en  « shortant » les thématiques de la vieille économie, comme le commerce physique, qui sont parmi les plus impactées.

Il faudra du temps pour que les dirigeants d’entreprises et les investisseurs puissent bénéficier d’une meilleure visibilité sur l’impact réel des mesures de distanciation sociale sur les revenus ; celui-ci sera tributaire de nombreuses variables (poursuite par les gouvernements des règles de distanciation sociale, découverte d’un traitement, succès des plans de relance, nouvelles vagues épidémiques). Trouver une solution à la crise actuelle ne se résume pas à une option binaire qui peut être résolue du jour au lendemain. Selon nous, les stratégies Actions Long Short peuvent être intéressantes dans l’environnement de marché actuel, car elles peuvent moduler leur appétit pour le risque et générer des performances grâce à leurs positions vendeuses et acheteuses sur de multiples thématiques d’investissement. Les bons stock pickers sauront sélectionner les gagnants et les perdants.

 

Global Macro

Les performances moyennes enregistrées par les stratégies Global Macro durant le mois sont comprises entre 0 et -3% environ. Cependant, la dispersion de performances entre les gérants a été relativement importante. Compte tenu de la rapidité des mouvements de marché observés en mars, les performances enregistrées durant le mois sont le reflet de leur positionnement en amont de la crise et du niveau de concentration de leurs investissements.

En règle générale, les gérants « bearish » ont surperformé grâce au biais vendeur de leurs portefeuilles, car toutes les classes d’actifs se sont effondrées. Un bon nombre de stratégies ont réussi à enregistrer des résultats corrects grâce à leurs ventes à découvert sur l’énergie et les devises émergentes, ou grâce à des trades dynamiques sur la dislocation des courbes de taux. Il est intéressant de noter que les gérants Global Macro focalisés sur l’Asie ont pu s’appuyer, à leur avantage, sur les informations obtenues lors du premier stress de marché en janvier. Compte tenu des niveaux de volatilité élevée et des incertitudes futures, les gérants de fonds privilégient actuellement la réévaluation des positions existantes et la réduction des risques. Les plans de relance massifs annoncés par les banques centrales et les gouvernements à travers le monde devraient contribuer à stabiliser le marché. Cependant, tant que la crise sanitaire ne sera pas maîtrisée et que nous n’aurons pas appris à vivre avec, les perspectives restent floues. Dans cet environnement, nous privilégions les gérants opportunistes et discrétionnaires capables de mettre à profit leurs talents d’analyse et leur expérience pour générer des gains sur quelques belles opportunités à travers le monde.

 

Stratégies quantitatives

La plupart des modèles quantitatifs ont eu des difficultés à gérer la remontée rapide et violente de la volatilité et des corrélations entre les actifs, entre la fin du mois de février et début mars. Les niveaux de volatilité extrêmes qui se sont prolongés en mars ont entraîné une forte baisse de l’effet de levier au sein des stratégies quantitatives, provoquant des performances médiocres et donc une nouvelle réduction du levier. La mise en place de l’interdiction de ventes à découvert dans certains pays d’Europe a contribué à accentuer l’effet de ce « deleveraging », car les gérants n’ont pas été en mesure de mettre en place ou ajuster les portefeuilles optimisés (positions vendeuses et acheteuses) en fonction de leur modèle. Les stratégies « trend following » qui ont bénéficié des tendances baissières marquées sur les actions, les devises, les taux et les matières premières, ont été particulièrement rentables.

 

Stratégies d'arbitrage de taux

Les stratégies de Valeur Relative sur les marchés obligataires ont connu l’un des mois les plus spectaculaires de leur histoire. A fin février, les mises en pension (repos) aux États-Unis ont montré des premiers signes de faiblesse et la base (le spread entre les obligations monétaires et les futures) a commencé à s’écarter. Alors que la crise liée au Covid-19 progressait et prenait de l’ampleur début mars, les marchés monétaires et les futures étaient totalement déconnectés. En deux semaines, la base aux États-Unis (quelle que soit la maturité, 2, 5 ou 7 ans) avait atteint des niveaux qui n’avaient plus été observés depuis 2008. Quelques gérants, obligés de réduire leur levier, ont dénoué leurs portefeuilles et la stratégie a touché un TRI implicite estimé de 30 %. Après l’intervention de la Fed, les gérants les plus chevronnés se sont repositionnés et ont pu bénéficier du resserrement. Si nous sommes très positifs à moyen terme sur la stratégie, ces événements ont néanmoins rappelé l’importance d’investir dans des gérants disposant de structures robustes.

 

Marchés émergents

Le mois a été très difficile pour les marchés émergents et les volumes excessifs d’informations que les marchés ont été contraints d’absorber ont provoqué des flux négatifs massifs pour la classe d’actifs. Compte tenu des perspectives annoncées début 2020, cette classe d’actifs a sans doute subi le retournement le plus brutal observé dans la sphère financière. Au lieu de peser le risque des primes de taux émergents par rapport à celui des marchés développés, les investisseurs examinent désormais les risques liés aux décotes notionnelles et sur les taux d’intérêt dans les pays surendettés et les économies trop dépendantes des exportations de pétrole. Le marché est cyclique et par conséquent, les dislocations massives offrent un terreau fertile pour de futures opportunités d’investissement à des prix d’entrée plus attrayants. Cependant, nous restons prudents envers cette stratégie, car outre les considérations fondamentales, les actifs des pays émergents pourraient souffrir de sorties de capital en faveur du High Yield des marchés développés et d’un manque de liquidité.

 

Risk arbitrage - Event-driven

Le mois de mars a été compliqué pour les stratégies Event-driven. Les fonds enregistrent une baisse moyenne de -5 % à -10 % durant le mois. Pour de nombreux gérants, ces pertes effacent 3 à 4 ans de performance. Mais ces résultats sont compréhensibles. Les stratégies de Merger Arbitrage cherchent à capter l’écart entre les cours de deux entreprises qui fusionnent leurs activités. Dans un scénario de « fin du monde », personne n’est en mesure de valoriser ces hypothèses dans le feu de l’action. Par ailleurs, les mouvements ont été amplifiés car certains gérants ont réduit la taille de leurs books. Au cours des 10 dernières années, la stabilité des performances générées par cette stratégie a engendré de fortes collectes, qui ont tendance à réduire la quantité d’alpha disponible. Les gérants avec lesquels nous nous sommes entretenus ont rapidement réévalué leur portefeuille d’opérations, afin de concentrer leur book sur des opérations stratégiques reposant sur des contrats de fusion solides, tout en se débarrassant des dossiers fortement endettés ou non-stratégiques dont les enchérisseurs sont des fonds de Private Equity. Les stratégies de Merger Arbitrage offrent des spreads intégrés intéressants sur ces opérations, pour un objectif de rendement annualisé d’environ 10 %. Ce chiffre varie selon les stratégies, en fonction de la concentration du portefeuille, du levier et du risque lié aux opérations. Cependant, il s’agit d’un point d’entrée intéressant pour une stratégie liquide, pouvant bénéficier de catalyseurs clairs si elle investit dans des opérations de fusions déjà annoncées.

 

Entreprises en difficultév

Les opportunités d’actions envers les entreprises en difficultés sont bien présentes, mais pas de la manière que nous avions prévue... Au lieu d’arriver progressivement à la fin du cycle de crédit, l’économie mondiale, plongée dans un coma artificiel, a lancé de nombreuses entreprises dans le mur à grande vitesse. La question n’est donc pas de savoir s’il y aura des opportunités dans ce segment, mais combien ? Nous sommes conscients que ces propos peuvent sembler indélicats, à l’heure où de nombreuses personnes à travers le monde se trouvent confrontées à de très grandes difficultés, et nous nous en excusons. Nous espérons que les plans de relance budgétaire mis en œuvre seront efficaces et permettront de limiter les dégâts pour nos économies. Cependant, force est de constater que ces plans ne pourront pas sauver toutes les entreprises de la planète. D’après nos échanges avec d’autres gérants expérimentés, il semble que le crédit soit actuellement cédé à des cours très décotés pour des raisons fondamentales, mais également à cause d’un manque de liquidité. Les gérants actifs dans ce segment ne se précipitent pas pour l’acheter pour autant. Une analyse fondamentale approfondie des actifs en vente est nécessaire avant d’émettre une offre au bon prix.

 

Stratégies Long short credit & High Yield

Les spreads de crédit sur les marchés Investment Grade et High Yield ont atteint des niveaux extrêmes qui n’avaient pas été observés depuis la crise de 2008. Le marché a également été impacté par le manque de liquidité, qui a poussé la BCE et la Fed à renforcer leurs programmes de rachat d’obligations Investment Grade. La Fed a également choisi d’inclure le High Yield dans ses programmes de rachat afin de gérer au mieux le nombre important « d’anges déchus » de catégorie Investment Grade tombés dans l’univers High Yield. Les agences de notation anticipent que la dette de ces anges déchus pourrait s’élever à 700 milliardsde dollars aux États-Unis – un volume sans doute trop élevé pour pouvoir être absorbé sans heurts par le marché High Yield. Contrairement au quatrième trimestre 2018, les arbitrages entre différentes opportunités sur le marché du crédit prendront plus de temps et les investisseurs pourront ainsi sereinement revoir leurs allocations.

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