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Depuis l'annonce du vaccin début novembre, et alors que l'économie mondiale continue de se redresser, les investisseurs se positionnent pour une réouverture de l'économie et délaissent progressivement les thèmes d'investissement liés au travail à domicile. On s’attendait à ce que l’inflation augmente une fois que les mesures de distanciation sociale se seraient assouplies, en raison des réserves d'épargne importantes des consommateurs américains, de l’attitude conciliante des banques centrales, des injections de liquidités supplémentaires dans l'économie et des contraintes pesant sur les stocks et les capacités de production des matières premières, des biens et des services. La rapidité de la hausse des bons du Trésor américain à 10 ans a néanmoins surpris le marché, provoquant un important mouvement de vente des actifs de croissance.
Portés par la thématique de l’après-COVID, les marchés se sont bien comportés pendant le mois. Les indices des petites et moyennes capitalisations, les indices cycliques et les indices « value » ont ainsi surperformé les indices vedettes de 2020, soutenus par les espoirs de reprise économique et la remontée des taux d'intérêt à long terme. Les rendements de la dette souveraine restent très bas, mais l’augmentation de 30 points de base des émissions souveraines à long terme des marchés développés en l’espace d’un mois seulement a été suffisante pour provoquer une onde de choc dans l’espace financier mondial. Les matières premières ont de nouveau connu un bon mois dans la perspective d’une offre restreinte face à une demande qui s’apprête à repartir à la hausse.
L’indice HFRX Global Hedge Fund EUR a gagné +1,48 % sur le mois.
Actions Long/Short
Le mois de février a été favorable aux stratégies actions long/short. Après avoir commencé l'année 2021 sur l'un des plus mauvais mois en termes de génération d'alpha, en raison notamment de la forte réduction du levier financier pendant la seconde moitié du mois de janvier, les gestionnaires long/short ont récupéré leurs pertes sur le début du mois de février. L'effet de sélection a été le principal facteur de performance. Même si la plupart des styles enregistrent des gains sur le mois, ce sont les « stock pickers » fondamentaux axés sur la valorisation des actions qui affichent les meilleurs résultats, surperformant largement les indices de base. La hausse des taux à long terme a accéléré la rotation des titres de croissance vers les titres de valeur. Après une décennie de sous-performance du style « value », il est difficile de savoir s’il s’agit d’une tendance temporaire ou du début d'une nouvelle phase du marché. Nous pouvons toutefois affirmer que la pentification de la courbe des taux confèrera davantage d’importance à la sélection des valeurs gagnantes par rapport aux valeurs perdantes et compliquera considérablement l’application par défaut du scénario de croissance standard qui a si bien fonctionné au cours des dix dernières années. Au cours du mois de février, les hedge funds ont été vendeurs des valeurs de momentum et des technologies non rentables/coûteuses en faveur des valeurs de l’industrie, de l’énergie, des matériaux et de la finance. Les stratégies actions long/short restent une opportunité d’investissement intéressante pour 2021. Lors du rebond du marché de l’an dernier, les corrélations intra-sectorielles et la dispersion intersectorielles ont été élevées, générant de nombreuses opportunités de valeur relative. Les gestionnaires peuvent également diversifier leurs liquidités dans des investissements acheteurs et vendeurs dans des secteurs en pleine restructuration, comme les médias, le commerce de détail, la mobilité ou l’énergie. Les stratégies long/short en actions sont particulièrement riches et diversifiées en termes de thématiques et de styles et disposent de différents outils pour faire face à des environnements de marché différents.
Stratégies Global Macro
Les gestionnaires Global Macro affichent des performances dispersées sur le mois, qui penchent malgré tout vers un rendement moyen positif dans l'ensemble. Certains ont été surpris par la rapidité de la hausse des bons du Trésor américain à long terme et ont enregistré des pertes sur leurs opérations de spread sur la courbe des taux américains, les positions acheteuses sur les obligations des marchés émergents et les positions vendeuses sur le dollar. Parmi les principales performances positives, on peut citer les gestionnaires qui enregistrent des gains sur l’achat d’indices actions, les opérations de valeur relative sur des paniers d'actions ou l’achat de matières premières. Nous continuons de privilégier les gestionnaires discrétionnaires opportunistes qui peuvent mettre à profit leurs compétences analytiques et leur expérience pour générer des gains sur des opportunités soigneusement sélectionnées à l’échelon mondial.
Stratégies quantitatives
Les stratégies quantitatives et les modèles de suivi de tendance se sont bien comportés pendant le mois. Si les seconds ont profité du mouvement de baisse des obligations pour enregistrer des gains sur la vente à découvert de titres obligataires, la hausse des rendements des émissions souveraines a provoqué une rotation des actions à forte croissance vers les valeurs cycliques qui semble avoir affecté les fonds d'arbitrage statistique sur actions. Cette catégorie de fonds affiche les plus mauvaises performances du mois, poursuivant un cycle de performance difficile dans lequel leurs modèles ont du mal à anticiper l’évolution des actions sur la base des schémas de comportement et de corrélation des titres. Même si le mois de février a été meilleur sur le plan des performances, les stratégies quantitatives continuent d'être malmenées. Sachant que les fonds quantitatifs tirent leur force de l'analyse d'énormes volumes de données historiques pour définir leur positionnement, on peut comprendre qu'ils éprouvent des difficultés à faire face à un environnement économique totalement inédit. Les suiveurs de tendance à court terme représentent un petit sous-ensemble de fonds qui a réussi à bénéficier des différentes phases du marché, enregistrant des gains dans les périodes de forte hausse et de forte baisse des marchés. Les fonds quantitatifs sophistiqués ont profité eux aussi de la volatilité accrue des marchés pour générer des rendements intéressants. Dans l’ensemble, les investisseurs sont malgré tout déçus des performances des fonds quantitatifs, car la plupart des algorithmes ont du mal à gérer l'augmentation rapide et violente de la volatilité des marchés et les corrélations entre actifs.
Stratégies d’arbitrage de taux
Depuis le mois de décembre, la courbe des taux s’est redressée et les swaps spreads ont augmenté en raison de la remontée des rendements américains et du changement de dynamique du marché. Les obligations américaines sont par conséquent devenues moins chères que les contrats à terme, ce qui élargit les opportunités pour la stratégie. En Europe, le faible niveau d'émissions a eu l'effet inverse (les obligations sont plus chères que les contrats à terme) tandis que les swaps spreads ont eux aussi augmenté. Ces récents changements en termes de positionnement global (d’une duration longue à une duration courte), motivés par la crainte d’une remontée de l’inflation, ont clairement amélioré l'écosystème de la stratégie.
Marchés émergents
Le mois a été difficile pour les investisseurs fondamentaux sur les marchés émergents, car la remontée des taux américains a fait resurgir le risque d'un « taper tantrum ». Cette situation pourrait amener les gestionnaires à adopter une approche plus prudente pour éviter une volatilité accrue dans les portefeuilles. Le niveau du dollar américain, qui est un paramètre crucial pour les marchés émergents, est actuellement influencé par deux forces contraires : la hausse des taux d'intérêt et l’aggravation des déficits budgétaires. Bien que cela puisse être source de volatilité à court terme, les fondamentaux des marchés émergents restent bons en raison de la reprise de l'économie mondiale et de la hausse des prix des matières premières qui permettra d’atténuer les déficits budgétaires des pays exportateurs de matières premières. Avec un marché obligataire qui reste largement dominé par des rendements négatifs, les marchés émergents représentent un univers d'investissement attrayant pour les investisseurs en quête de revenus obligataires décents. Les perspectives macro-économiques restent toutefois très incertaines pour ces marchés que les spécialistes de la gestion fondamentale considèrent comme une option intéressante dans un univers de taux zéro. Au vu de la fragilité des fondamentaux, ils adoptent généralement une approche très sélective. La prudence est de mise, en raison de la plus forte sensibilité de cette classe d'actifs aux flux d’investissement et à la liquidité du marché.
Risk arbitrage – Event-driven
Les stratégies Event Driven ont connu un bon mois en février, avec des contributions positives des arbitrages sur fusions et des situations spéciales. Le volume des opérations de fusion reste solide et sachant que les spreads actuels sont encore attrayants, certains gestionnaires réduisent les montants alloués aux situations spéciales, qui sont plus sensibles à la direction du marché, pour augmenter leur allocation sur les opérations de fusion. Cela leur permet de viser un rendement attrayant et d'accroître la résilience de leurs stratégies, tout en conservant une certaine protection contre le bêta du marché des actions. Les opérations de fusions-acquisitions devraient se poursuivre dans un avenir proche. Les taux d'intérêt sont bas, les entreprises ont réduit leurs coûts et émis des titres de créance et des actions pour faire face à la crise, mais aussi pour être prêtes à s'emparer d'actifs stratégiques. Cette activité est alimentée par les impératifs de restructuration dans les secteurs en difficulté (énergie ou voyage par exemple), la volonté de consolidation dans les secteurs de la santé, de la finance et des télécommunications et la nécessité de s'adapter à la nouvelle réalité d’aujourd’hui en rachetant des technologies qui seraient trop longues ou trop coûteuses à développer, dans le secteur des semi-conducteurs par exemple.
Entreprises en difficulté
Les stratégies axées sur les émetteurs en difficulté ont connu un bon début d’année. Alors que les perspectives de réouverture de l'économie se précisent, les actifs en difficulté bénéficient de la nouvelle vague de revalorisation des actifs. Il est intéressant de noter qu'en 2020, les gestionnaires de cette catégorie ont été nombreux à enregistrer des niveaux de rotation de portefeuille supérieurs à la moyenne. Lorsque le marché s’est effondré à la fin du 1er trimestre, tous les actifs ont chuté indépendamment de leur qualité. Les gestionnaires les plus performants ont été capables de fournir de la liquidité en achetant des actifs de qualité à prix réduit. Au fil de l’année, ils ont vendu ces positions avec un bénéfice pour se tourner vers des actifs plus stressés. Depuis que ces actifs se sont fortement revalorisés à la suite de l’annonce des vaccins, certains commencent à prendre des bénéfices pour acheter les segments les plus intéressants du marché des actifs en difficulté qui seront en mesure de rebondir avec la réouverture de l’économie. Telle est la situation en ce début d’année. Nous privilégions les stratégies éprouvées et diversifiées afin d’éviter de subir des épisodes de volatilité extrême. Ces conditions de marché ne sont pas simples à appréhender pour les gestionnaires qui attendaient toutefois un tel environnement et les opportunités qui en découlent depuis plus d’une décennie.
Crédit Long/Short & High Yield
Les spreads sur les marchés Investment Grade et High Yield ont précédemment atteint des niveaux extrêmes, inédits depuis la crise de 2008. Le marché a également souffert d’un manque de liquidité, ce qui a incité la BCE et la Fed à intensifier leurs programmes de rachat de dette Investment Grade. La Fed a également décidé d’inclure le segment du High Yield dans son programme de rachat afin d’atténuer l’impact du grand nombre de titres Investment Grade dévalués en High Yield. Les spreads Investment Grade et sur le High Yield de qualité sont désormais proches des niveaux d’avant la crise en Europe et aux États-Unis. Les bonnes nouvelles concernant les taux d’efficacité élevés des vaccins de Pfizer-BioNTech et de Moderna ont accentué la compression des spreads, ce qui a soutenu la surperformance des émetteurs plus risqués. Quoiqu’il en soit, il est trop tard pour miser sur le bêta et nous estimons que les stratégies long/short sur le marché du crédit offrent des opportunités intéressantes, tant au niveau des positions longues que courtes, pour tirer parti des incohérences fondamentales consécutives à la dislocation du marché cette année.