Les perturbations de la chaîne d’approvisionnement liées au coronavirus pourraient affecter la croissance économique

 

Le ralentissement du cycle d’activité se sera poursuivi quasiment jusqu’en fin d’année, tous les pays du G10 se trouvant désormais en situation de « ralentissement » ou de « récession Cette tendance correspond parfaitement aux prévisions du FMI, qui avait revu à la baisse ses chiffres sur la croissance mondiale. Les États-Unis sont également concernés par cette tendance et les données récentes, comme l’ISM du secteur manufacturier, sont en baisse, même si le risque de récession semble s’être estompé. Si les marchés pointent vers une courbe des taux non-inversée, l’intervention de la Fed sur les marchés des prises en pension pourrait également expliquer le phénomène. Au sein de la zone euro, le cycle continue de décélérer et la probabilité d’un retournement est désormais supérieure à 50 %, tandis qu’au Japon, le cycle ralentit toujours. L’économie britannique ne semble pas connaître d’amélioration et se trouve toujours en phase de récession, bien que l’incertitude liée au « Brexit » se soit dissipée, le Royaume-Uni ayant désormais quitté l’UE, même si un nouvel accord commercial semble rencontrer des obstacles. Globalement, la faiblesse du cycle économique à l’échelon mondial, confirmée par nos modèles internes (depuis le début de l’année 2019) est bien avérée, même si la probabilité d’une récession forte s’est atténuée. Malgré les efforts historiques consentis par les banques centrales, les niveaux d’inflation restent obstinément bas. Aux États-Unis, le cycle d’inflation a glissé sous la moyenne pour passer en zone de désinflation. La zone euro, qui a en quelque sorte fait figure d’exception au cours des derniers mois, a vu son indicateur plonger et ne donne aucun signe de redressement. Sans surprise, dans ces conditions, les banques centrales du monde entier ont continué de maintenir leur attitude accommodante, à l’avantage des investisseurs. Ce qui est également inquiétant, c’est que l’année 2019 a été marquée par un activité hors du commun des banques centrales qui, de manière collective, ont adopté une attitude conciliante, baissé les taux et procédé à des achats d’actifs. Malgré cela (et presque six mois plus tard), nous ne voyons toujours pas les niveaux d’inflation bouger. De leur côté, les banques centrales continuent d’être prudentes et sont prêtes à intervenir. Les banques centrales des marchés émergents disposant assurément de munitions pour faire face à de faibles chiffres macroéconomiques. Le retour des menaces géopolitiques (guerre commerciale, « Brexit » et Iran) semble avoir été remplacé par la crise du coronavirus, qui s’est répercutée à travers le monde. La Chine en a été la principale victime, dans la mesure où une contraction du PIB sera très probablement observée. Nous nous attendons à une intervention supplémentaire des autorités chinoises (après les deux baisses des taux de la banque centrale) sous la forme d’une relance budgétaire permettant de stimuler la croissance économique chancelante. Les marchés développés seront également affectés par le virus, sous l’effet des perturbations de la chaîne d’approvisionnement. Si le plein impact de la crise reste encore à évaluer, les marchés obligataires devraient, selon nous, bénéficier de l’épidémie et les marchés du crédit devraient être soumis à une volatilité accrue en raison de la contagion, accentuant ainsi l’importance d’être sélectifs.

Neutre sur les principaux taux européens et sur les taux américains

La Fed a récemment signalé son intention de maintenir ses taux bas, procédant en fait à une mise en garde contre les effets négatifs du coronavirus. Dans ce contexte, nous préférons passer à neutre sur les taux américains, plutôt que d’être négatifs comme nous l’avons été précédemment. Dans la zone dollar, nous avons également une légère préférence pour les obligations australiennes, le cycle économique continuant de se détériorer, en raison des feux de brousse et de la proximité du pays avec la Chine (et donc avec les effets négatifs du virus). En outre, la banque centrale semble avoir des munitions pour agir sur les taux ou même pour envisager un éventuel assouplissement quantitatif. Les marchés européens périphériques ont continué de bénéficier du soutien des mesures de la BCE. Ils ont enregistré de solides performances depuis le début de l’année, avec une mention spéciale pour l’Italie, où la prime supplémentaire intégrée dans les spreads italiens pour parer au risque d’élections anticipées est susceptible de se réduire davantage. L’Espagne et le Portugal présentant également un faible risque politique à court terme, nous détenons une surpondération importante envers les obligations souveraines périphériques de la zone euro. L’Irlande fait figure d’exception, les dernières élections ayant vu le Sinn Fein obtenir un résultat historique en remportant le pourcentage de votes le plus élevé. Nous conservons notre avis négatif sur l’Irlande, compte tenu des valorisations actuelles.

Les taux des principaux pays de la zone euro ont connu un important repli, les taux allemands passant de -0,2 à -0,4 en seulement deux semaines, principalement sous l’effet de l’incertitude liée à l’épidémie et à l’impact économique du coronavirus. En effet, malgré la revue stratégique du QE par la BCE et l’amélioration de certaines données, les valeurs refuges tels que les taux allemands ont bien performé. Face à un accroissement de l’allocation en faveur des taux périphériques, notre allocation globale aux taux de la zone euro est neutre, grâce à notre exposition sous-pondérée à l’égard des taux allemands, lesquels sont relativement chers par rapport à leurs homologues souverains « core » (France, Autriche).

Nous avons soldé notre position acheteuse sur les obligations indexées sur l’inflation, en raison de leur performance importante depuis l’été et des obstacles qui devraient se présenter à court terme. En effet, compte tenu de la faible dynamique des cours du pétrole, de l’affaiblissement des chiffres d’inflation globale attendus dans les prochains mois, de l’offre historiquement élevée de nouvelles émissions au premier trimestre et du portage moins attrayant pour l’échéance de mars, nous sommes repassés à neutre.

 

Devises des marchés développés: position neutre sur le dollar

Notre cadre d’analyse interne fait toujours ressortir un avis négatif à l’égard du dollar américain. Les baisses des taux de la Fed et son attitude conciliante vont également dans le sens d’un affaiblissement du dollar, le président américain manifestant clairement sa préférence pour un billet vert affaibli. Nous pensons toutefois, qu’après leurs récentes interventions, les banques centrales vont faire une pause. Dans ce contexte, nous préférons avoir une position neutre sur le billet vert, tout en continuant à gérer notre position de manière tactique.

 

Crédit: maintien d’une exposition aux obligations européennes Investment Grade

Notre vue favorable sur le crédit européen Investment Grade(IG) reste inchangée, en dépit de son niveau de valorisation tendu. Cette classe d’actifs continue d’être soutenue par de solides facteurs techniques, notamment des entrées de capitaux massives. Le « backstop » de la BCE continue de représenter la principale source de soutien, avec plus de 4 milliards d’euros d’achats nets en janvier. Avec le programme d’achats d’actifs actuel, l’offre nette sera négative, soutenant le marché au comptant et limitant tout élargissement des spreads. Si les fondamentaux semblent sains, nous ne pouvons exclure certaines révisions à la baisse des bénéfices au cours de deux prochains trimestres, avec la crise du coronavirus et les mesures drastiques prises par les autorités chinoises. La sélectivité est primordiale, car le risque de se retrouver avec des anges déchus reste d’actualité, 20 % des sociétés notées BBB risquant d’être déclassées. Même si jusqu’ici les entreprises ont été capables de défendre leur note IG, toute révision à la baisse des bénéfices pourrait accélérer le processus de dégradation de leur note. C’est plus vrai encore pour le marché américain, où 30 % des titres BBB sont à risque. De nouveaux émetteurs sont entrés sur le marché à la fin du mois de décembre et en janvier, dans un contexte marqué par une faiblesse des fondamentaux. Ainsi, si l’on tient compte de l’endettement plus élevé, d’une plus forte sensibilité aux taux d’intérêt et d’un coût de couverture plus élevé, il n’y a aucun intérêt pour un investisseur européen à se tourner vers le marché américain.

 

Marchés émergents: Avis plus favorable, dans la perspective d’une stabilisation de la croissance mondiale

Nous restons prudemment favorables envers la dette émergente en devise forte, la classe d’actifs continuant de bénéficier explicitement de l’attitude accommodante des banques centrales, de perspectives stables sur les matières premières et de l’espoir d’une reprise de l’économie mondiale dans le sillage de l’accord commercial de « phase 1 » entre les États-Unis et la Chine. La crise du coronavirus complique les perspectives de croissance pour l’économie chinoise et les économies émergentes à court terme. Il semble néanmoins pour le moment que l’impact sera concentré sur le premier trimestre et qu’il sera suivi d’une reprise économique en forme de V au deuxième et au troisième trimestre. Les valorisations absolues de la classe d’actifs ne sont pas attrayantes, après le rebond enregistré en décembre et en janvier, bien qu’il existe des poches de valeur sur certains segments, notamment sur les obligations notées B et BB, en termes relatifs par rapport aux obligations IG émergentes et au crédit américain. Le pourcentage des titres obligataires offrant un rendement négatif (20 %) reste proche de son sommet de 2016 et devraient favoriser les entrées de capitaux dans le segment de la dette émergente.

En ce qui concerne notre allocation en devises locales, nous avons neutralisé notre exposition globale à la duration et avons effectué une rotation en dehors des marchés à rendement peu élevés (Malaisie, Thaïlande), en faveur des marchés à rendements plus élevés (Indonésie, Mexique) présentant un potentiel de hausse résiduel, tout en reconnaissant que les cycles d’assouplissement monétaire des banques centrales émergentes sont presque terminés pour le moment.

Nous maintenons une exposition globalement neutre aux devises émergentes. Nous sommes en effet préoccupés par l’impact du coronavirus sur la croissance, qui pourrait remettre en cause l’hypothèse d’une surperformance des marchés émergents par rapport au marché américain, une condition nécessaire à la surperformance des devises locales . Si nous observions une reprise de la surperformance en matière de croissance des marchés émergents par rapport aux marchés développés, nous serions prêts à renforcer notre exposition aux obligations locales des marchés émergents.

Devises fortes

La dette émergente en devise forte s’est renforcée (+1,5 %) bien que la performance soit passée en milieu de mois d’une évolution alimentée par les spreads émergents (-1,5 %) à une évolution portée par les bons du Trésor américain (3,1 %) suite à la montée des craintes liées au coronavirus et malgré des chiffres d’activité meilleurs que prévu au niveau mondial. Avec ce passage en mode « risk off », les spreads émergents ont augmenté de 23 pb (à 314 pb), les rendement des bons du Trésor américain à 10 ans ont gagné 41 pb (à 1,51 %), le pétrole a chuté (-11,9 %) en raison des inquiétudes relatives à l’impact de l’épidémie de coronavirus sur une reprise mondiale encore fragile, mais le S&P500 (-0,16 %) s’est accroché à ses gains du mois de décembre, signalant un impact plus modéré et transitoire. La province de Buenos Aires (Argentine) a essayé de repousser à début mai une échéance de remboursement partiel due en janvier sur une obligation à échéance de 2021, ce qui a été considéré comme une complication supplémentaire superflue dans une restructuration souveraine déjà difficile. Le segment IG (2,3 %) a surperformé le haut rendement (0,6 %), les meilleurs rendements provenant du Surinam (10,7 %) et du Tadjikistan (8,1 %) et les plus mauvais de l’Argentine (-8,1 %) et de l’Équateur (-5,5 %).

Avec un rendement de 4,8 %, les valorisations de la dette émergente en devise forte ne sont pas attrayantes en termes absolus, même si elles offrent toujours de la valeur en termes relatifs dans un univers obligataire encore largement caractérisé par des rendements négatifs au niveau mondial (24 % de l’univers à fin janvier). L’écart de rendement entre la dette émergente à rendement élevé et celle notée IG reste attrayant, tout comme celui entre les obligations émergentes notées B ou BB et leurs homologues américaines à rendement élevé. L’intérêt à moyen terme de la dette émergente reste lié à la stabilité des perspectives des bons du Trésor américain et des matières premières. La stabilisation de la croissance mondiale et du commerce pourrait favoriser une nouvelle compression des spreads émergents dans un environnement de tensions commerciales réduites. Sur un horizon d’un an, la dette émergente en devise forte devrait offrir un rendement d’environ 2 % en faisant l’hypothèse d’un rendement de 1,7 % pour les bons du Trésor américain à 10 ans avec des spreads émergents à 300 pb.

Nous continuons de surpondérer le High Yield par raport à l’Investment Grade. Dans l’univers High Yield, nous restons exposés à des situations idiosyncrasiques, comme l’Egypte, les Ghana et l’Ukraine, qui continuent d’offrir de la valeur par rapport à l’équilibre des fondamentaux/risques politiques, ainsi qu’à des exportateurs d’énergie qui se négocient à des prix intéressants, comme l’Angola, Bahreïn et l’Equateur. Nous conservons une exposition à l’Argentine, dont les obligations se négocient au niveau des valeurs « en difficulté » (aux alentours de 40 %) et en-dessous des valeurs de recouvrement estimées d’environ 60 à 70 centimes pour un dollar. Dans l’univers Investment Grade, nous détenons des positions sur l’Indonésie et la Roumanie, mais restons sous-exposés aux segments les plus chers de cet univers (Chine, Malaisie, Philippines et Pérou).

Nous restons sous-pondérés sur le Liban, la Russie et l’Arabie Saoudite, estimant que les risques politiques ou de sanctions ne sont pas suffisamment rétribués par ces crédits. Nous avons une surpondération en obligations d’entreprises et quasi-souveraines du Brésil, du Mexique et de la Turquie, qui affichent des valorisations intéressantes, contre une sous-pondération des obligations souveraines similaires. Nous conservons également une position tactique de 6 % sur l’indice de dérivés de crédit (CDX.EM), pour nous protéger de l’incertitude générale liée à l’impact du coronavirus sur la croissance mondiale.

Devises locales

La classe d’actifs a subi une correction de 1,3 % en janvier, due essentiellement au taux de change (2,7 %), la duration et le portage ayant rapporté 1 % et 0,5 % chacun. Dans un contexte marqué par un appétit pour les actifs risqués en début d’année, le marché a été perturbé par le déclenchement de l’épidémie de coronavirus dans la province chinoise de Hubei. Le virus a entraîné une réaction spontanée sur le pétrole (-12 %) et sur les principaux taux qui ont également favorisé la duration au sein des marchés émergents locaux, alors que les devises émergentes auxquelles les investisseurs étaient le plus exposés ont connu une poussée de volatilité. Les devises les plus exposées à la Chine ont sous-performé, soit par le biais de leur sensibilité aux matières premières (Rand sud-africain -6,8 %, Peso chilien -6,1 %) ou au tourisme (Baht thaïlandais -4,7 %), alors que les devises considérées comme étant plus isolées ont surperformé (Roupie indonésienne 1,7 %). Les devises d’Europe centrale et orientale sont restées globalement inchangées par rapport à l’euro (-1,2 %), la prudence de la politique monétaire constituant le facteur différentiateur (du forint hongrois, -3,3 % à la couronne tchèque, -0,4 %).

Le rebond des bons du Trésor américains (-40 pb) a favorisé la duration en Amérique Latine et en Asie, où l’activité économique et l’inflation continuent toujours de fléchir. Les spreads de taux se sont resserrés de 38pb en Colombie, devant le Brésil, le Mexique, l’Indonésie et la Malaisie, où les spreads se sont tous contractés de -20 pb. Les taux ont sous-performé au Chili (+13 pb) et en Hongrie (+9 pb).

Avec un rendement de 5 %, la dette émergente en devises locales se compare favorablement aux autres segments obligataires, surtout compte tenu de la trêve dans la guerre commerciale sino-américaine et des signes de reprise de la croissance mondiale. A moyen terme, la dette émergente devrait aussi bénéficier de l’amélioration des fondamentaux, des perspectives d’inflation modérée et d’une politique monétaire accommodante au niveau mondial. Sur un horizon de douze mois, la dette émergente en devises locales devrait générer un rendement d’environ 6 %, avec un gain seulement marginal des devises émergentes (1 %) compte tenu de perspectives mondiales légèrement plus élevées.

Au niveau de la dette émergente en devises locales, nous avons pris partiellement quelques bénéfices en diminuant notre exposition à la duration des devises à taux bas et sommes désormais davantage exposés aux devises à rendement plus élevé. L’annonce d’un accord commercial sino-américain faite en décembre laisse en effet espérer une stabilisation de l’économie mondiale et les marchés émergents à taux bas, sensibles aux bons du Trésor américains, semblent avoir épuisé leur potentiel. La stratégie « dette émergente en devises locales » n’est désormais que marginalement acheteuse de duration, via les marchés à rendements élevés comme l’Indonésie, le Mexique et les marchés à rendements moins élevés comme la Chine et la Pologne. Nous avons un positionnement modérément acheteur de duration sur les marchés à rendements élevés comme la République Dominicaine, le Pérou, la Russie et la Turquie et sur un marché à rendement moins élevé, la Malaisie, en étant presque neutre sur le reste des marchés obligataires émergents locaux en devises locales.

L’épidémie de coronavirus en Chine et sa propagation dans le reste du monde a conduit la reprise de la croissance mondiale à marquer une pause, malgré la conclusion de l’accord commercial de « phase 1 ». Les mesures proactives prises par le gouvernement local ont causé d’importantes perturbations dans la chaîne d’approvisionnement mondiale, en particulier dans le secteur électronique et, marginalement, dans les services.

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